Par Régis Gagnon, intervenant en soins spirituels - 1er décembre 2017
Centre Spiritualitésanté de la Capitale-Nationale
Après 19 ans comme intervenant en soins spirituels, j’ai pris la décision de prendre ma retraite du monde de la santé. Ces années travaillées au sein du Centre Spiritualitésanté de la Capitale-Nationale m’ont permis de mettre mes forces en valeur au service des personnes malades et de leurs proches.
J’ai surtout œuvré auprès des clientèles en situation critique et en soins palliatifs. Celles-ci m’ont confronté plus d’une fois au mystère de la souffrance et de la mort sous toutes ses formes.
Ce que je retiens de ces années, c’est la force libératrice de la parole, parole qui est vérité, qui rend libre. Comme la société, le monde de la santé est un monde où tout va vite, ce qui est peu propice à l’écoute et à la confidence.
Mon premier désir fut toujours d’être une présence empreinte de compassion, de respect et d’espérance. En particulier en situation critique où la médecine déploie toute sa science, les proches ne savent plus où donner de la tête et les membres du personnel médical et infirmier, hélas, n’ont pas toujours le temps pour offrir cette présence.
Je me rappelle cette conjointe d’un patient décédé à l’âge de 40 ans, me disant à son départ : « Vous avez fait partie des bons soins que nous avons reçus.» Cette citation de Jean-François Malherbe fut toujours inspirante pour moi :
Quand nous allons à la rencontre d’une personne souffrante, il faut entrer chez elle comme sur la pointe des pieds, sans faire de bruit, sans s’imposer. Ensuite, il faut écouter, permettre à l’autre de se dire, d’exprimer, dans ses mots et avec ses sentiments, ce qu’elle vit. Ensuite, après avoir bien écouté, repartir comme on est venu, c’est-à-dire, sur la pointe des pieds, avec beaucoup de respect et d’humilité, simplement heureux d’avoir permis à la personne de se dire et d’avoir fait un pas en avant.
Prendre soin spirituellement fut toujours pour moi, d’abord de me retrouver devant un mystère, un mystère sacré, mystère d’une vie qui est là, terrorisée par la maladie. Ma priorité fut toujours d’ « être » avec la personne et que mon écoute apporte réconfort et ouverture sur la vie. Comme êtres humains, nous sommes trop centrés sur la vie immédiate. Nous voulons tout contrôler et quand la maladie – et encore plus la mort – nous visite, voilà que tout semble s’écrouler et on se retrouve comme dans un cul-de-sac. Nous oublions que la souffrance et la mort sont fécondes. Elles peuvent être un passage qui nous ouvre des chemins inattendus conduisant à une nouvelle vie. C’est la qualité d’écoute qui permet à l’autre de faire un pas en avant, de découvrir une Vie nouvelle.
C’est ce qu’a dit un jour Huguette, devant sa famille présente, s’adressant à son conjoint : « C’est drôle, je vais mourir et on dirait que je commence à vivre. » Et cet homme en soins palliatifs, après un long temps d’écoute où il a pu se dire jusqu’au bout : « C’est le plus beau jour de ma vie! »
Ces années à être « présence » auprès des personnes malades ou en fin de vie et de leurs proches, furent l’expérience d’une présence habitée, de part et d’autre. Ceci me permettant de grandir pour apprécier la vie qui m’est prêtée et d’apprivoiser ma propre mort.
Mon désir d’être présence, par ce ministère auprès des malades, fut confirmé par une patiente que j’ai accompagnée dans les dernières semaines avant de prendre ma retraite. Elle m’a écrit dans une carte : « Vous avez été pour moi, ministre de la Tendresse de Dieu. »
Le Centre Spiritualitésanté de la Capitale-Nationale (CSsanté) assure le fonctionnement au quotidien des services de soins spirituels répartis dans plus de 30 sites du réseau de la santé et des services sociaux de la ville de Québec et de ses environs. Il est constitué d’une quarantaine d’intervenants et d’intervenantes en soins spirituels.
Le CHU de Québec-Université Laval est l’établissement fiduciaire. À ce titre, il a la responsabilité d'administrer les ressources humaines et financières du CSsanté.