Par Dominique Nguyen, intervenant en soins spirituels - 1er août 2021
CHU Sainte-Justine
Tout d’abord, j’aimerais exprimer toute ma reconnaissance envers la revue Spiritualitésanté de me donner cet espace afin de partager une expérience qui a été marquante dans le cadre de mon travail. Étant impliqué dans un centre pédiatrique, on m’a assigné plus précisément à l’unité de néonatalogie pour intervenir auprès des parents de nouveau-né : des grands prématurés, prématurés ou à terme, tous avec leurs défis de santé. Par ailleurs, il arrive que j’intervienne en amont en obstétrique à l’unité de grossesses à risque élevé (GARE) pour faciliter les suivis en néonatalogie après l’accouchement.
J’ai été appelé un jour par l’infirmière de l’unité GARE pour intervenir auprès d’une patiente de 35 ans avec une grossesse gémellaire. Aux dires de l’infirmière, elle se dit être spirituelle et pratiquer la méditation. Mais à son arrivée à l’hôpital, elle paraissait très anxieuse. Une fois à la chambre, je me suis présenté : « Bonjour, je me nomme Dominique, je suis l’intervenant en soins spirituels. Je viens faire une première visite d’accueil pour savoir comment ça va, comment vous vous sentez… ». La patiente, assise sur son lit, laissait se dessiner un sourire sur son visage et m’a invité à m’approcher. Il est arrivé cette fois-là que je prenne le repose-pied du fauteuil pour m’asseoir ce qui me mettait à la même hauteur que la personne. C’était une façon symbolique de m’ajuster à sa vulnérabilité… Les expériences relationnelles difficiles répétées lui renvoyaient à une perte de foi en son identité en tant que personne autonome, animée par des rêves et des projets. Oui, anxieuse était-elle à son arrivée à l’hôpital. « Je veux me retrouver, disait-elle, avoir du temps pour moi. Je pratique le Reiki, mais ça ne m’aide pas pour le moment, je reste préoccupée… » Sans insister sur le potentiel de la pratique du Reiki, il était important pour moi de dire, de refléter que selon la patiente cette ressource spirituelle ne fonctionnait pas pour le moment et ainsi manifester mon écoute, ma compréhension et mon empathie. « Je veux avoir mon espace, je prie à tout ce qui peut nous entendre (dirigeant ses mains et ses doigts vers le haut). Je crois beaucoup aux énergies. J’essaie de demander les bonnes énergies pour ma vie. Je veux travailler aussi auprès des enfants et participer à leur éveil personnel et spirituel… », précisait-elle avec des yeux lumineux. Comme intervenant en soins spirituels, je demeurais centré sur la personne et ma confiance en ses capacités était au rendez-vous spécialement lorsqu’elle vivait une catharsis en précisant qu’une ressource spirituelle ne répondait plus à ses besoins. En touchant elle-même les bas-fonds de sa souffrance, la patiente s’est trouvé d’autres moyens tels que la prière, les énergies et sa foi en son identité de personne portant des souhaits, des projets et des espérances! Elle en fut émotive.
Lorsqu’est venu le temps de conclure l’entretien, j’ai repris les grandes lignes de son récit pour lui permettre d’apprécier son cheminement, ses besoins, ses forces spirituelles, ses apprentissages. À sa demande, j’ai formulé des souhaits/prières en utilisant ses propres mots et expressions : À tout ce qui peut nous entendre, énergies, avoir du temps pour soi, avoir son espace. La patiente s’en est trouvée plus apaisée, écoutée, comprise et reconnaissante de ma visite. J’ai quitté la chambre pour faire la note au dossier sur la requête professionnelle qui m’était faite par l’infirmière en y faisant l’analyse spirituelle et cela m’a conduit à identifier ses besoins et les moyens que la patiente s’est donné pour y répondre. À la fin de la note, comme orientation/plan, j’ai laissé savoir que la réalité de la grossesse et la santé de son bébé n’ont pas été abordées par la patiente. Je recommande de demeurer attentifs à son évolution et de l’état psychosocial et spirituel de madame. Comme intervenant, cela nous donne non pas un emploi du temps pré fait pour les rencontres à venir, mais une posture et une attention ajustées pour les prochains suivis.
Les soins spirituels m’appellent à reconnaître les ressources aidantes chez la personne, mais aussi à entendre humblement celles qui le sont moins sans empressement à y trouver des solutions toutes faites. L’aide spirituel s’incarne alors dans le rythme des patients où la souffrance doit être entendue et reconnue. Toujours, je me souhaite d’avoir la finesse d’esprit de mettre en lumière les nouvelles ressources émergentes que la personne se donnera à elle-même.