Communiquer la science avec passion

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Doctorante en médecine moléculaire à l’Université Laval et étudiante dans le laboratoire du professeur Jacques P. Tremblay de l’axe Neurosciences du Centre de recherche du CHU de Québec-Université Laval (CRCHU), Kelly Godbout a développé depuis plusieurs années un intérêt marqué pour la communication scientifique.

Déjà passionnée au secondaire et aux études collégiales, Kelly offrait du tutorat en sciences et en mathématiques aux élèves en difficulté pendant ses temps libres. Aujourd’hui, elle prend plaisir à partager ses travaux de recherche en rendant la thérapie génique accessible et compréhensible pour tous et toutes.

L’an dernier, elle a remporté la finale provinciale du concours de communication scientifique Science POP, organisé par l’Institut de recherches cliniques de Montréal (IRCM). Près d’une trentaine de finalistes des quatre coins de la province y ont présenté leur projet de recherche dans une formule vulgarisée.

À l’approche de notre compétition interne qui se déroulera le 27 septembre prochain au Centre Le Montmartre, nous nous sommes entretenus avec Kelly pour connaître son parcours et ses conseils sur la communication scientifique.

Nous invitons d’ailleurs le grand public à venir assister aux présentations cet automne lors d’une soirée festive. Une belle façon d’en apprendre davantage sur nos recherches et nos découvertes, en plus d’avoir l’occasion de discuter avec nos étudiants et nos étudiantes!

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Q : Qu'est-ce qui t'a attirée vers la recherche, et plus particulièrement vers le domaine de la génétique?

Kelly : Avant de commencer mon baccalauréat en biologie, je voulais surtout faire de la recherche sur la vie marine, étudier les mammifères marins, comme le béluga et la baleine. Puis, après quelques sessions, je me suis vraiment intéressée à la biologie moléculaire et à la génétique humaine. 

La génétique, c’est vraiment la base de l’être humain; elle dicte notre santé et qui nous sommes. En faisant de la recherche, c’est là que l’on peut avoir un impact à la racine même des problèmes de santé.


Q : Tu t’es beaucoup investie dans le tutorat pendant tes études. Peux-tu nous parler de ton expérience?

Kelly : J’ai fait beaucoup de tutorat pendant mon baccalauréat, et mon horaire était parfois trop plein. Ça m’a menée à écrire deux livres d’exercices et de résumés pour les élèves de secondaire 5, un livre pour les mathématiques sciences naturelles de secondaire 5 (SN 5) et un pour la physique de secondaire 5.

J’ai ensuite créé une plateforme en ligne, Dre Réussite https://drereussite.com/, avec des capsules vidéo et des fiches résumées, parce que ce n’est pas tout le monde qui peut apprendre uniquement par la lecture. J’ai ainsi réussi à joindre 4 000 étudiants et étudiantes au Québec.

J’étais un peu travailleuse autonome, et avec le bouche à oreille, ça fonctionnait quand même très bien. Puis comme ça, je pouvais avoir plus de flexibilité dans le type d’accompagnement que je pouvais offrir. C’est sûr qu’il faut se faire un horaire et mettre ses priorités aussi, mais ce sont mes passe-temps à moi! Puis quand tu aimes ça, ça va de soi.


Kelly Godbout anime un atelier scientifique devant des jeunes enfants de Lévis, Bellechasse, Montmagny et l’Islet.


Q : Pourquoi est-ce que, selon toi, c’est important de vulgariser certains concepts scientifiques ou nos découvertes au grand public?

Kelly : C’est super important pour les aider à développer un esprit critique par eux-mêmes. Le meilleur exemple pour l’illustrer est celui de la COVID. Les gens ne savaient pas ce qu’était un vaccin, donc comment veux-tu avoir une opinion sur quelque chose que tu ne connais pas?

C’est la même chose pour les changements climatiques : il faut être capable de comprendre pour prendre une décision éclairée par soi-même et non juste écouter les courants de pensée qui peuvent être propagés par les réseaux sociaux.

Puis nos découvertes, ça donne aussi de l’espoir. On leur parle de nos avancées et des traitements pour telle maladie. Ils ont toujours les yeux pétillants quand on leur parle de ce qu’on fait, et surtout quand ils peuvent comprendre. Et après ça, ils en parlent à leurs proches.


Q : Selon toi, quel est le plus grand défi quand on veut vulgariser des sujets scientifiques complexes?

Kelly :
Le plus grand défi, c’est de trouver l’équilibre entre les détails scientifiques et la clarté nécessaire pour permettre aux gens de comprendre.

Pour cela, il faut tester souvent. J’en parle à mes grands-parents, à ma petite sœur de 9 ans, à mon frère adolescent, à mes parents, à mon voisin, puis j’essaie de développer mon approche et d’utiliser les bons termes. C’est une question de trouver la bonne métaphore ou le bon exemple qui nous permettra de leur faire comprendre.



Kelly Godbout a présenté un atelier scientifique multigénérationnel à Saint-Vallier, dans Bellechasse, devant plusieurs enfants, parents et grands-parents.


Q : Dans ta présentation de l’an dernier à Science POP, tu comparais la génétique à la recette d’une tarte aux pommes. D’où t’est venue cette idée-là?

Kelly :
En fait, c’est un cheminement qui est venu en plusieurs étapes. Quand j’explique l’ADN aux enfants et aux gens, je leur dis souvent que c’est comme des instructions pour notre corps, comme une recette. Je parlais de métaphores tout à l’heure; il y a plusieurs comparaisons que l’on peut faire entre une recette et notre corps.

Les maladies génétiques sont souvent causées par une erreur. Je cherchais un exemple, un aliment ou une recette, où en changeant une lettre, on obtient quelque chose de complètement différent. C’est là que j’ai pensé à « pomme » et « gomme ». En changeant le « P » par un « G », ça donne quelque chose qui n’est plus comestible.

Puis ça me donnait aussi toute la flexibilité pour expliquer d’autres concepts associés à la génétique, comme les mutations, la traduction de l’ARN et le génome.

Vous pouvez (re)voir la présentation de Kelly à Science POP 2023 :




Q : Comment est-ce que tu te pratiques pour une présentation ou une conférence?

Kelly :
En premier, je le fais par moi-même, puis je l’étoffe. Je me fais un brouillon avec toutes mes idées et je garde les meilleures. Je peaufine, j’enlève des parties trop compliquées, je change l’ordre… C’est tout un travail!

Après cela, je me pratique en l’expliquant à plusieurs personnes et j’essaie de voir s’il y a quelque chose qui cloche. C’est important de faire une rétrospection et de se demander si les gens ont bien compris. S’ils me disent que quelque chose n’est pas clair, j’essaie de réexpliquer de façon plus claire, mais en tenant compte de chacune de leurs questions.


Kelly Godbout donne une présentation sur la thérapie génique au bar Ninkasi, pendant Le Bar des curieux, une initiative du Comité des Initiatives Étudiantes de ThéCell.


Q : Nous avons eu la chance de t’entendre à l’émission Moteur de recherche à Radio-Canada ICI Première. Est-ce que tu peux nous parler de ta préparation et de comment ta première chronique s’est déroulée?

Kelly :
Avant mon stage, j’avais déjà participé à l’émission pour parler de la thérapie génique. C’était une entrevue en studio avec Matthieu Dugal et les autres invités. J’ai fait une préentrevue avec une recherchiste et après, tu te prépares pour connaître vraiment ton sujet et être prête à toute éventualité en direct.

J’ai ensuite fait un stage d’immersion de trois jours grâce à Science POP en octobre 2023. Je participais aux réunions d’équipe et aux brainstorms, j’assistais à l’enregistrement de l’émission en studio pour en apprendre un peu plus sur le fonctionnement. La semaine suivante, je suis revenue faire une chronique. À partir d’une question d’un auditeur, tu commences à faire une revue de littérature sur le sujet. Moi, c’était sur les avancées de CRISPR-Cas9, donc je suis allée voir toutes les nouvelles sur les essais cliniques.

C’est souvent déchirant de devoir couper certaines choses. Je voudrais vraiment expliquer d’où vient CRISPR, parler de cet essai clinique qui est super intéressant, mais le temps est limité. Ça vient aussi avec son lot de stress, parce que tu as déjà ton texte et tu ne veux pas t’éparpiller.

J’ai vraiment aimé mon expérience, surtout avec l’ambiance du studio et des invités autour de la table!

Pour (ré)écouter son entrevue sur les thérapies géniques et sa chronique sur les avancées du ciseau CRISPR.


Matthieu Dugal, animateur de l’émission radiophonique Moteur de recherche à ICI Première, et Kelly Godbout au studio de Radio-Canada.


Q : Est-ce qu’il y a un quelqu’un qui t’a particulièrement inspirée dans ton parcours?

Kelly :
Oui, deux personnes! Mon professeur de sciences au secondaire à l’école Pointe-Lévy, Patrick Ruel. Quelqu’un de vraiment passionnant! Il était dynamique dans son approche et utilisait des exemples concrets. Il faisait vraiment de la vulgarisation en enseignant, et il réussissait à partager sa passion et à nous faire comprendre les notions. C’est lui qui m’a vraiment donné la piqûre pour la science.

Et il y a aussi l’un de mes professeurs à l’Université Laval, Alan Anderson, qui est un peu une légende au baccalauréat en biologie. Il enseignait ses cours avec passion, toujours dédié à ses élèves et à nous expliquer tout en détail. Et pour moi, qui posais beaucoup de questions, s’il n’avait pas la réponse, il revenait le cours d’après avec les explications.


Q : Pour finir, quels conseils donnerais-tu à tes collègues étudiant(e)s qui participeront à Science POP cet automne?

Kelly :
Je dirais qu’il ne faut pas attendre d’être parfait avant de se lancer : « Practice makes perfect » comme on dit en anglais! Moi, par exemple, j’avais déjà donné plusieurs ateliers scientifiques avec des enfants et des conférences à différents endroits. Ça vient avec le temps.

Le truc, c’est vraiment d’en faire. Il faut se faire confiance! Une opportunité en apporte une autre. Si je peux donner un exemple, j’ai été contactée par Till & McCulloch Meetings, une conférence en médecine régénératrice, thérapie cellulaire et génique qui aura lieu à Montréal cet automne. Ils organisent une session avec le comité étudiant et je vais être l’une des panélistes. Je suis vraiment contente qu’ils me donnent cette opportunité!

Partager sa passion, vraiment, tout passe par là. C’est simple : si tu es passionné, ton auditoire t’écoutera et s’accrochera à ce que tu dis. Avec une bonne préparation, tu parles avec ton cœur et ta passion, et c’est ça qui fera toute la différence.

 


Photo principale : Kelly Godbout. 
Photo : © Institut de recherches cliniques de Montréal (IRCM)

 


Commentaires



 

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25 septembre 2024

Félicitation Kelly
Très beau parcour , continu ta route , le monde a besoin de tes découvertes. Bonne chance pour vendredi et merci de nous avoir partagé tes expériences.On est très fière de notre petite fille et on t'aime beaucoup. Bisous

Par Gilles Roy
23 septembre 2024

Félicitation, belle entrevue
On est fier de ton parcours . Bonne continuité

Par Jeannine Duval




Dernière révision du contenu : le 23 septembre 2024

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