Si le travail des stomothérapeutes est méconnu, il est pourtant indispensable dans un centre hospitalier. Au CHU de Québec-Université Laval, elles sont huit infirmières à exercer cette profession et à « faire la différence » au quotidien pour les patients ainsi que pour les équipes de soins.
Pour en savoir plus sur cette profession, Le Chuchoteur a rencontré Christine Hins, infirmière clinicienne en stomothérapie depuis 2004. « Je suis infirmière depuis 1988 et j’ai commencé à travailler en tant qu’infirmière clinicienne en chirurgie à l’Hôpital Saint-François d’Assise (HSFA) en 1990. Un jour, j’ai été informée que l’infirmier qui s’occupait des stomies partait à la retraite dans trois semaines. Mon chef m’a donné cinq minutes pour décider si je voulais apprendre comment faire et prendre la relève! Comme je me dis toujours qu’il n’arrive rien pour rien, j’ai accepté et j’ai suivi le cours. » C’est ainsi que Christine est devenue la première stomothérapeute à HSFA!
Pour être stomothérapeute1, il faut d’abord être infirmière bachelière et avoir acquis au moins deux ans d’expérience en soins, réussir le cours d’une durée de 12 mois avec stages de l’Institut d’enseignement en plaies, stomies et continence, puis passer l’examen donnant droit à la certification canadienne de l’Association des infirmières et infirmiers du Canada (AIIC).
Christine ajoute qu’il faut aussi « aimer les défis et aimer sortir de la routine, parce qu’il n’y a pas deux patients pour qui c’est pareil et pas deux journées qui se ressemblent! »
Un titre, trois spécialités
La stomothérapeute a un rôle de consultation, au même titre qu’un autre professionnel de la santé. Elle évalue et effectue le suivi des patients qui ont une stomie, ce qui comprend les stomies d’élimination (intestinale, urinaire) et d’alimentation (gastrostomie), que celle-ci soit due à un cancer, à une maladie inflammatoire ou à tout autre problème de santé. Elle s’occupe aussi d’évaluer et de soigner les patients ayant des fistules cutanées, des plaies complexes (lésion de pression ou traumatique, ulcère neuropathique, pied diabétique, ulcère veineux ou artériel, plaie oncologique, déhiscence de plaie, etc.). Enfin, elle peut également soigner les patients souffrant d’irritations ou de lésions dues à des problèmes d’incontinence.
Au CHU, les huit stomothérapeutes sont réparties entre l’Hôpital de l’Enfant-Jésus (HEJ), L’Hôtel-Dieu de Québec (L’HDQ) et l’Hôpital Saint-François d’Assise. Bien qu’elles finissent par acquérir des habiletés supplémentaires en fonction des spécialités de chacun des hôpitaux (par exemple, les chirurgies colorectale et vasculaire à HSFA, les blessés médullaires et les polytraumatisés à HEJ, l’oncologie au Centre intégré de cancérologie et à L’HDQ), les stomothérapeutes doivent être en mesure de s’occuper de toutes les clientèles, enfants comme adultes, et de tous les problèmes relevant de leur expertise, car elles peuvent être appelées à se déplacer d’un hôpital à l’autre, notamment parce qu’elles sont de garde à tour de rôle pour les besoins du CHUL et de l’Hôpital du Saint-Sacrement.
La stomothérapeute visite les patients stomisés le lendemain de leur opération et commence l’enseignement des notions importantes reliées à leur stomie (quel matériel utiliser, comment l’entretenir, quand le remplacer, etc.) et, par le biais de demandes de consultation, s’occupe des patients qui ont des plaies complexes, quelle que soit leur unité d’hospitalisation ou la cause de leurs plaies. Lorsque ce patient quitte l’hôpital pour retourner dans son milieu de vie, la stomothérapeute élabore son plan de traitement et prescrit les pansements nécessaires.
À la clinique externe, la stomothérapeute rencontre des patients pour des suivis post-opératoires ou pour des problèmes ponctuels, mais aussi des nouveaux patients qui auront bientôt une chirurgie pour la création d’une stomie. Lors de ces rencontres, elle démystifie la stomie, transmets des informations de base et procède au « marquage » (traçage de repères sur la peau du patient à l’intention du chirurgien). En plus des patients qui se présentent pour un rendez-vous à la clinique externe, la stomothérapeute est régulièrement appelée à voir les patients de l’urgence dans les cliniques ambulatoires ou au Centre intégré de cancérologie.
« Les patients nous disent qu’ont fait une grosse différence pour eux, et je pense que c’est entre autres parce qu’on prend le temps de les écouter – ils se confient beaucoup à nous – et d’être là dans un moment de leur vie qui est difficile. Notre prise en charge est globale, ce n’est pas juste la stomie ou la plaie qui est considérée, mais plutôt le patient tout entier et c’est vraiment lui qui est au centre de nos soins. »
La stomothérapeute forme également des stagiaires en stomothérapie ainsi que des infirmières soignantes. De plus, elle demeure une référence pour tous les autres professionnels de la santé à Québec comme en région.
Un plus pour améliorer les soins
Avec un rôle qui couvre aussi large, on comprend mieux à quel point le travail de la stomothérapeute est indispensable pour bien des patients. Mais les bienfaits ne s’arrêtent pas là! En effet, il est prouvé que les soins fournis par la stomothérapeute améliorent l’efficacité et la rentabilité des traitements, qu’ils contribuent à diminuer le temps d’hospitalisation, qu’ils soutiennent le travail de toute l’équipe médicale et qu’en plus, pour toutes ces raisons, ils aident à diminuer les frais médicaux.
« C’est un travail qui est tellement valorisant! On le sait et on le voit qu’on fait une différence quand par exemple on peut suivre l’amélioration de l’état d’un patient. C’est aussi une profession qui est stimulante, car c’est une pratique autonome qui nous donne l’occasion d’exercer notre jugement clinique. Et ce n’est pas monotone, car des défis, il y en a chaque jour! On est une petite équipe, mais on s’entraide, on se challenge, le but état toujours d’optimiser les soins aux patients. »
Bien que passionnée par son travail, Christine prendra sa retraite l’an prochain. Elle est particulièrement fière d’avoir été celle qui a développé la pratique de la stomothérapie à HSFA, mais elle est encore plus fière d’avoir su transmettre sa passion à d’autres.
En plus d’avoir fait la différence pour les patients et les équipes de soins, Christine pourra dire qu’elle a aussi fait la différence pour la relève!
Marie-Andrée Masson et Anne-Marie Trudel, stomothérapeutes.
Jessica Larose et Marie-Carine Lemieux, stomothérapeutes.
Martine Baron et Nathalie Dorval, stomothérapeutes.
Christine Hins, stomothérapeute, et Camilla Pinheiro Cristaldi, infirmières remplaçantes.
Magaly Houde et Lydia Lemieux, infirmières remplaçantes.
Photo principale : Christine Hins, stomothérapeute.
Note
1. Au Québec, c’est l’appellation « infirmière clinicienne stomothérapeute » qui prévaut, mais au Canada, le terme officiel est « infirmière spécialisée soin de plaies, stomie et continence ».