En mai dernier, le conseil d’administration du CHU de Québec-Université Laval (CHU) a adopté son premier cadre de référence sur l’approche de partenariat avec les usagers et leurs proches. C’est un signal fort pour que soient amorcés des travaux qui permettront de développer une réelle culture de partenariat avec nos patients, leurs proches et la communauté.
Par Lynda Bélanger, psychologue et responsable du Bureau d’expertise en expérience patient et partenariat (BEEPP), Direction de la qualité, de l’évaluation, de l’éthique et des affaires institutionnelles (DQEEAI)
L’approche de partenariat avec les usagers et leurs proches repose sur des principes qui encouragent les personnes à prendre une part active dans les décisions relatives à leur santé et à exercer une plus grande influence sur celle-ci ainsi que sur l’organisation des soins et des services dans les établissements de santé. L’approche de partenariat définit la façon dont se déroulent la prestation de soins, le rôle des intervenants et des patients* ainsi que l’apport de chacun. Elle met l’accent sur une relation d’égalité entre les intervenants, les patients et leurs proches, ces derniers adoptant un rôle actif et étant considérés comme des partenaires dans l’équipe de soins.
Dans ce contexte, les intervenants tiennent compte de l’expérience de vie du patient en lien avec son état de santé. Les intervenants tendent également à renforcer l’intégration des attentes et des besoins de l’usager dans une vision commune afin que la recherche de solutions et les choix de traitement en tiennent compte. À terme, l’approche de partenariat vise à améliorer les capacités d’autogestion et de prise de décision du patient, à renforcer son autonomie et sa responsabilisation vis‐à‐vis de ses soins, des services qu’il reçoit et, plus globalement, de sa santé.
Autrement dit, l’approche de partenariat met l’accent sur l’importance de reconnaître les connaissances et les savoirs de chacun dans la relation intervenant-patient – et ceci inclut le savoir expérientiel des patients et de leurs proches – ainsi que le droit des usagers à être impliqués dans les décisions de santé qui les concernent. La relation mise donc sur la complémentarité et le partage des savoirs de chacun ainsi que sur la façon avec laquelle les divers partenaires travaillent ensemble1. Bien entendu, l’objectif est d’améliorer la santé et le bien‐être des usagers et de leurs proches en rehaussant la qualité et la sécurité des soins, mais aussi leur pertinence pour le patient, afin d’assurer les meilleurs résultats et la meilleure expérience possible.
Par ailleurs, plusieurs effets bénéfiques sont associés à la présence ou à l’implication accrue des proches dans les soins du patient2. Les proches sont très souvent des partenaires essentiels, car ils connaissent bien le patient et peuvent fournir aux soignants des informations importantes le concernant lorsque celui-ci n’est pas en mesure de le faire.
Le partenariat et l’amélioration des soins et des services
L’approche de partenariat avec les patients et les proches se vit aussi dans l’amélioration des soins et des services. Depuis quelques années, les patients et leurs proches ont tendance à vouloir s’impliquer davantage dans l’organisation des soins et des services. D’ailleurs, au CHU, presque toutes les équipes d’amélioration continue de la qualité (EACQ) et plusieurs comités incluent des patients comme membres permanents. Ces « patients-partenaires ressources » sont non seulement des partenaires de leurs propres soins, mais ils partagent également leur expérience et leurs connaissances des trajectoires avec les intervenants et les gestionnaires afin d’améliorer la qualité de la prestation et de l’organisation des soins et des services.
Pourquoi encourager cette approche?
L’augmentation constante des maladies chroniques et complexes exerce une pression croissante sur les ressources limitées des systèmes de santé et de services sociaux. Ainsi, le patient doit jouer un rôle de plus en plus actif dans ses soins, notamment parce qu’une proportion importante de ceux-ci est donnée par le patient lui-même, ses proches ou la communauté. En effet, on estime que de 95 à 99 % des soins apportés à une personne ayant une maladie chronique seraient fournis par la personne elle-même ou par ses proches3.
On observe également que la recherche d’informations liées à la santé est très courante dans la plupart des pays industrialisés et que plusieurs demandent à être impliqués plus activement dans les décisions et les soins qui les concernent ou concernent leurs proches. Ceci constitue d’ailleurs un droit de l’individu, inscrit dans la Loi sur les services de santé et les services sociaux4.
Enfin, les données probantes suggèrent qu’une plus grande participation des patients à leurs soins et aux décisions concernant leur santé est associée à une meilleure observance des recommandations médicales, une meilleure gestion de leurs symptômes, une meilleure perception de leur état de santé, une meilleure expérience et une plus grande satisfaction face aux soins et aux services reçus. En parallèle, cette participation accrue est également associée à une meilleure gestion des ressources de santé, ce qui se traduit notamment par une diminution des erreurs médicamenteuses, des chutes, du taux de réadmission et des coûts5. Ces nombreux effets positifs sont un plaidoyer puissant pour cette approche, tant sur le plan clinique qu’éthique.
Un cadre de référence propre au CHU
En 2018, le ministère de la Santé et des Services sociaux (MSSS) a publié son cadre de référence sur « l’approche de partenariat entre les usagers, leurs proches et les acteurs en santé et en services sociaux » 6. Dans ce document, le MSSS expose ses orientations face à cette approche et encourage les établissements de soins de santé et de services sociaux à l’adopter et à amorcer des travaux afin de la faire vivre. Le CHU endosse pleinement cette philosophie de soins et place le développement d’une culture du partenariat avec les usagers et leurs proches dans ses priorités organisationnelles.
Le cadre de référence propre au CHU vise à faire connaître cette approche, à se doter d’un langage commun et à guider l’identification de pistes d’action concrètes pour soutenir les intervenants, les gestionnaires, les patients et leurs proches dans ce changement. Le cadre de référence présente aussi le modèle d’organisation des activités de partenariat en précisant les rôles et les responsabilités des diverses parties prenantes de l’établissement.
Objectifs spécifiques du cadre de référence du CHU
- Faire connaître l’approche et les concepts associés
- Se doter d’un langage commun pour parler de l’approche de partenariat
- Proposer des pistes de réflexion et d’action afin de développer une réelle culture du partenariat
- Favoriser la coordination des activités liées au partenariat dans les différents secteurs
- Contribuer à la mobilisation active de tous les intervenants, condition essentielle à la création de la culture de partenariat au CHU
Conclusion
L’implantation de cette approche implique des changements importants pour les patients, leurs proches et les soignants, mais aussi pour les gestionnaires et les décideurs. Pour créer un environnement propice au changement, il est important que toutes les parties prenantes s’engagent dans la construction de ce changement ensemble parce qu’ensemble, on va plus loin!
Consulter le cadre de référence
Visionnez cette vidéo pour en savoir plus sur les patients-partenaires ressources :
* Depuis quelques années, le réseau de la santé et des services sociaux québécois a délaissé le terme « patient » en faveur du terme « usager ». Cependant, dans le présent texte, « patient » est utilisé de manière interchangeable avec « usager ».
Le Bureau d’expertise en expérience patient et partenariat
« L’expérience patient » est un indicateur de la qualité d’un milieu de soins au même titre que la sécurité et l’efficacité des soins. Elle fait partie intégrante du cycle d’amélioration continue de la qualité de notre établissement. C’est aussi un aspect incontournable mis de l’avant par Agrément Canada, tout comme l’approche de partenariat avec nos usagers et leurs proches. L’un des mandats du Bureau d’expertise en expérience patient et partenariat (BEEPP) du CHU est de recueillir, de manière structurée et standardisée, les perceptions des usagers et de leurs proches sur la qualité de l’expérience qu’ils ont vécue durant leur trajectoire de soins et de services, afin de soutenir les équipes cliniques et les directions dans les processus d’amélioration de la qualité.
Un autre mandat du BEEPP est de contribuer au développement d’une culture organisationnelle axée sur le partenariat avec nos patients et leurs proches. Les activités de recrutement et de formation des patients partenaires y sont notamment centralisées.
Le BEEPP fait partie du module Qualité, partenariats et expérience patient, de la Direction de la qualité, de l’évaluation, de l’éthique, et des affaires institutionnelles (DQEEAI).
Références
- Courtney R, Ballard E, Fauver S, et al. The partnership model: working with individuals, families, and communities toward a new vision of health. Public health nursing (Boston, Mass). 1996;13(3):177-186.
- Deek H, Hamilton S, Brown N, et al. Family-centred approaches to healthcare interventions in chronic diseases in adults: a quantitative systematic review. Journal of advanced nursing. 2016; 72(5):968-979
- Funnell MM. Helping patients take charge of their chronic illnesses. Family practice management. 2000;7(3):47-51.
- Ministère du Travail, de l’Emploi et de la Solidarité sociale. Loi sur la Santé et les Services sociaux (LSSSS) chapitre S-4.2,. Publications Québec, 1991.
- Hibbard JH, Greene J. What the evidence shows about patient activation: better health outcomes and care experiences; fewer data on costs. Health Aff (Millwood). 2013; 32(2):207-214.
- Ministère de la Santé et des Services sociaux (MSSS). Cadre de référence de l’approche de partenariat entre les usagers, leurs proches et les acteurs en santé et services sociaux. 2018:1-38.