Un établissement hospitalier comme le CHU de Québec-Université Laval (CHU), c’est l’équivalent d’une ville1 où s’activent des femmes et des hommes dont le travail est important, mais parfois méconnu. La chronique Un secret bien gardé vous invite à découvrir leur histoire et leurs talents.
Dans cette édition : Catherine Labbé, infirmière en pratique avancée.
Mordue de plein air, de sports, de cirque, de nutrition et surtout de ses trois filles, Catherine Labbé est aussi passionnée par son domaine professionnel, soit la périnatalité et le diabète. Et cette passion ne fait que grandir depuis qu’elle est infirmière en pratique avancée.
Lorsque Catherine a terminé ses études en 2003, elle savait déjà qu’elle voulait travailler en périnatalité. Puisqu’aucun poste n’était alors facilement accessible dans cette spécialité à Québec, elle a accepté sans hésiter une offre du CHU Sainte-Justine et s’est exilée à Montréal pour un an.
En 2004, le Centre mère-enfant Soleil du CHU de Québec-Université Laval (CHU) a ouvert ses portes, et Catherine a pu revenir dans sa ville natale pour y travailler comme infirmière en grossesse à risque.
Entre 2009 et 2022, sa pratique s’est orientée en diabète de grossesse. Pendant cette période, Catherine a obtenu sa certification de l’Association des infirmiers et infirmières du Canada en périnatalité et a entrepris une maîtrise dans le cadre de laquelle elle a mené un important projet de recherche sur l’expression anténatale de colostrum chez les mères diabétiques de type 1.
« Ma maîtrise visait à valider si cette pratique pourrait améliorer le taux d’allaitement et l’exclusivité de l’allaitement chez les mères diabétiques de type 1. Comme infirmière, lors des rencontres post-partum à six semaines, je m’étais rendu compte que plusieurs mères diabétiques de type 1 n’allaitaient plus ou avaient rencontré beaucoup de difficultés pour le faire, précise Catherine. L’allaitement, c’est quelque chose que j’ai vraiment à cœur; je suis aussi consultante en allaitement et j’ai allaité mes trois enfants longtemps. L’allaitement a un effet préventif sur la santé et il comporte beaucoup d’avantages autant pour la mère que pour l’enfant. C’est en bonne partie pour ça que j’ai intégré le sujet dans mon projet de recherche. »
Ce diplôme de deuxième cycle ainsi que l’expertise qu’elle a développée depuis le début de sa pratique ont permis à Catherine d’obtenir, en février 2023, un poste d’infirmière en pratique avancée (IPA) en médecine, dans le secteur du diabète et des maladies pulmonaires. « J’ai fait une maîtrise parce que j’avais le goût d’aller plus loin, de développer quelque chose pour améliorer ma pratique clinique, et aussi parce que j’avais aussi le souhait de devenir IPA. J’avais le goût de faire changer les choses de façon positive. »
En parallèle de sa maîtrise, Catherine a voulu aller encore plus loin et a entrepris de vérifier si l’expression anténatale de colostrum chez les mères diabétiques de type 1 avait des effets bénéfiques sur la santé maternelle et fœtale. De ce deuxième volet de sa recherche a été tiré un article publié en collaboration avec Diane Tousignant, consultante en allaitement, dans la revue Perspective infirmière de l’Ordre des infirmières et infirmiers du Québec (OIIQ), tandis que le projet de recherche initial, mené dans le cadre de la maîtrise de Catherine, a été publié dans la Revue francophone internationale de recherche infirmière en collaboration avec Nicole Ouellet, sa directrice de maîtrise.
« J’avais le goût d’essayer d’avancer des choses pour les mères diabétiques de type 1, parce que la grossesse est une étape charnière pour une femme; elle doit s’adapter à plusieurs changements dans toute les sphères de sa vie. Pour les femmes qui vivent avec le diabète, la grossesse apporte aussi des changements dans la gestion et le contrôle de leur glycémie, et cela leur demande encore une plus grand capacité d’adaptation. De plus, elles vivent beaucoup de stress parce qu’elles se culpabilisent des impacts possibles de tout ce qu’elles font sur la santé de leur bébé. Les mères diabétiques de type 1 sont vraiment remarquables; c’est incroyable la résilience et la force qu’elles ont, parce que vivre avec le diabète au quotidien, c’est une grosse charge mentale. »
Bien que son rôle d’IPA soit bien différent de son rôle d’infirmière, Catherine y trouve son bonheur : « Ce qui me motive, c’est l’amélioration de la qualité des soins, et ce que j’aimais le plus dans ma pratique d’infirmière clinicienne, c’était l’enseignement aux patients, de les faire évoluer avec les explications que je donnais. Dans mon rôle d’IPA, c’est un peu la même chose que je fais, mais avec les infirmières, en développant des outils et en soutenant l’implantation des pratiques exemplaires pour améliorer la qualité des soins pour les personnes qui vivent avec le diabète ou une maladie pulmonaire. »
Qu’est-ce que ça fait, une infirmière de pratique avancée?
L’infirmière est « sur le terrain » avec les patients, tandis que l’infirmière en pratique avancée exerce des fonction d’experte clinique dans une spécialité donnée, de recherche et de gestion d’activités cliniques dans l’ensemble du CHU de Québec-Université Laval. Elle a pour mission de faire progresser les soins en se basant sur les données probantes.
« Dans mon quotidien, je suis devant mon ordinateur à développer des projets qui sont prioritaires. Je suis toujours disponible aussi pour dénouer des enjeux et répondre à des questions plus pointues des conseillères en soins », précise Catherine.
L’expression anténatale de colostrum et ses bienfaits
« L’expression anténatale de colostrum favorise l’allaitement et la satisfaction que les mères diabétiques de type 1 retirent de cette expérience. Mon projet de recherche dans le cadre de ma maîtrise a décrit l’expression anténatale comme une pratique qui permet d’augmenter le taux d’allaitement exclusif et la durée de l’allaitement. En complément de ces travaux, nous avons fait un projet de recherche qui visait à décrire les effets de l’expression anténatale de colostrum sur la santé maternelle et fœtale. Les résultats de notre étude témoignent d’un taux d’allaitement exclusif de 78,9 % six semaines après l’accouchement. Elle démontre aussi que l’expression anténatale de colostrum permet de diminuer les épisodes d’hypoglycémies néonatales, favorise la cohabitation mère-enfant et diminue le risque d’hospitalisation à l’unité néonatale. Depuis un an environ, l’expression anténatale de colostrum est pratiquée au Centre mère-enfant Soleil du CHUL pour les mères qui le désirent. »
Note
1. 92,9 % des villes du Québec comptent moins d’habitants que le nombre d’employés (14 000) du CHU. Source : https://www.mamh.gouv.qc.ca/organisation-municipale/decret-de-population/ .