Deux essais cliniques menés au CHU génèrent des résultats changeant les pratiques

Image.


L’équipe de recherche du Dr Alexis Turgeon, intensiviste et chercheur au centre de recherche du CHU de Québec-Université Laval, qui mène de front plusieurs essais cliniques de traitements contre la COVID-19, a récemment annoncé les premiers résultats concernant le plasma de convalescents et les anticoagulants pour le traitement des patients gravement malades de la COVID-19 hospitalisés à l’unité des soins intensifs.

La plateforme d’essais cliniques REMAP-CAP, qui teste les effets de plusieurs interventions chez les patients hospitalisés atteints de la COVID-19, a récemment terminé le recrutement dans les essais sur le plasma de convalescents et les anticoagulants chez les patients gravement malades admis à l’unité des soins intensifs. 

Ces deux essais cliniques financés par les Instituts de recherche en Santé du Canada (IRSC) se sont terminés au cours des dernières semaines à la suite d’une analyse planifiée des résultats chez les patients gravement malades de la COVID-19 nécessitant une admission à l’unité des soins intensifs. Cette analyse a montré que le plasma de convalescents et les anticoagulants n’amélioraient pas l’état clinique chez ces patients malgré le fait qu’elles étaient parmi les interventions les plus prometteuses et sécuritaires pour cette population. « Pour les patients gravement atteints, ces traitements n’ont pas montré l’effet clinique escompté, explique le Dr Turgeon. Nous n’avons pas observé d’amélioration de la mortalité ni de la récupération clinique chez ces patients très malades pour lesquels peu de traitements existent. »

Ces observations, qui vont à l’opposé de ce que les équipes de soins croyaient, montrent l’importance d’effectuer des essais cliniques d’envergure dans lesquels les patients reçoivent ou non le traitement selon une répartition aléatoire. En effet, le plasma de convalescents, un composant sanguin contenant des anticorps contre le virus SARS-CoV-2, est obtenu auprès de personnes qui se sont rétablies de la COVID-19 et semblait très prometteur pour avoir notamment été utilisé par le passé dans des contextes de pandémie virale. L’hypothèse des chercheurs impliqués dans cet essai, dirigé au Canada par le Dr Turgeon, était que ces anticorps pourraient neutraliser le virus, empêcher sa réplication ultérieure et arrêter les lésions tissulaires en cours lorsque transfusés à des patients gravement malades de la COVID-19. Bien que ce mécanisme ait été démontré en théorie, aucun effet tangible sur les malades n’a pu être observé.

D’autre part, la COVID-19 étant associée à un processus inflammatoire important et à la formation de caillots dans les petits vaisseaux sanguins, l’utilisation des anticoagulants semblait tout à fait appropriée pour ces patients. Ces médicaments, qui visent à éclaircir le sang, sont utilisés pour prévenir et traiter les caillots sanguins; ils possèdent de plus des propriétés anti-inflammatoires. En se basant sur cet usage, de nombreux médecins ont d’ailleurs administré des anticoagulants à dose élevée (dose thérapeutique) aux patients gravement atteints de la COVID-19 admis dans les unités de soins intensifs, sans attendre les résultats d’essais cliniques rigoureux comme ceux de REMAP-CAP.

Les chercheurs ne savent pas encore pourquoi le plasma de convalescents et les anticoagulants à dose élevée n’ont pas aidé les patients atteints de la COVID-19 gravement malades admis à l’unité des soins intensifs. « Ces résultats sont inattendus et, bien entendu, décevants. Nous analysons actuellement les données pour mieux comprendre les effets du traitement et évaluer si certains sous-groupes de patients pourraient en bénéficier », explique le Dr Turgeon. 

« Ces résultats représentent un immense effort de collaboration impliquant des patients, des familles, des membres du personnel médical, des médecins et des chercheurs du monde entier, ce qui nous permet d’apprendre rapidement comment traiter au mieux la COVID-19 », ajoute-t-il. 

En menant des essais cliniques comme ceux-ci, l’équipe du Dr Turgeon contribue à démêler les pièces du casse-tête que représente la COVID-19, en déterminant quels traitements sont véritablement efficaces et quelles options thérapeutiques sont plutôt à éviter.

À lire aussi : Un essai clinique peut-il vraiment être « négatif »?

L’équipe de recherche en soins intensifs du CHU est impliquée dans une vingtaine d’essais cliniques randomisés au CHU, la plupart évaluant des traitements chez les patients hospitalisés en raison de la COVID-19. En plus du Dr Turgeon, l’équipe est constituée de plusieurs chercheurs, notamment les Drs François Lauzier, Charles Francoeur, Lynne Moore, Mélanie Bérubé et Maude St-Onge, mais également une équipe formée d’un coordonnateur scientifique (Olivier Costerousse), de coordonnateurs de recherche (David Bellemare, Marie-Pier Patton, Lucy Clayton), d’infirmières de recherche (Eve Cloutier, Émilie Couillard-Chénard, Gabrielle Guilbault, Marie-Claude Boulanger), de professionnels de recherche (Rana Daher, Kahina Soltana, Peter Gerges, Amina Belcaid), d’assistants de recherche (Antoine Tremblay, Shany Rodrigue, Louis-Charles Mallard, Marie-Pierre Légaré-Baribeau), de biostatisticiens (Xavier Neveu, Pier-Alexandre Tardif) et de soutien administratif (Marjorie Daigle). 

Les deux essais cliniques dont il est question ici ont été rendues possibles grâce à une subvention des Instituts de recherche en Santé du Canada à l’Université Laval à une collaboration internationale sans précédent dans REMAP-CAP, une plateforme d’essais cliniques randomisés, intégrés, multifactorielle et adaptative sur la pneumonie acquise en communauté, ayant recruté près de 10 000 patients atteints de COVID-19 dans plus de 290 centres à travers le monde. 


Commentaires



 

Voir les commentaires
Aucun commentaire.

Dernière révision du contenu : le 17 février 2022

Signaler une erreur ou émettre un commentaire