Recherche clinique génie tissulaire-neurochirurgie : réparation personnalisée pour nerfs endommagés

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Quand par accident un nerf est sectionné ou trop étiré, les possibilités actuelles pour le réparer sont d’une efficacité plutôt limitée, mais le professeur François Berthod a peut-être trouvé la recette pour aider les nerfs à repousser.

Dans un centre de traumatologie comme l’Hôpital de l’Enfant-Jésus, les cas d’accidents lors desquels une rupture ou un étirement des nerfs d’un bras ou d’une jambe survient ne sont pas rares. Ce type de blessure entraîne une perte importante des fonctions motrice et sensorielle du membre affecté, voire sa paralysie. À l’heure actuelle, il est parfois possible de réparer partiellement ces nerfs en procédant à une autogreffe : une partie du nerf sural, un nerf sensitif de la jambe, est prélevé, puis « cousu » au nerf endommagé. Les nerfs périphériques ayant la capacité de repousser jusqu’au muscle à une vitesse d’environ 1 millimètre par jour, cette repousse combinée à l’autogreffe aide à rétablir une partie des fonctions sensitives et motrices. Selon la gravité et la longueur de la blessure, le taux de récupération peut varier entre 25 et 75 %. Cependant, quand le nerf endommagé est trop gros ou que la distance à combler jusqu’au muscle est trop grande, cette technique ne fonctionne plus.

Pour améliorer les traitements actuels, plusieurs équipes de recherche dans le monde testent des petits tubes en polymère qui servent à guider la repousse des nerfs. Malheureusement, le succès n’est pas toujours rendez-vous, puisqu’en présence d’un nerf de longueur et de calibre plus importants, le manque d’oxygène à l’intérieur du tube bloque la repousse.

« Notre solution consiste à créer des tissus vivants et vascularisés par des capillaires à partir de cellules endotéliales1 prélevées par biopsie de peau. On enrobe ensuite ces cellules dans une matrice fabriquée avec des fibroblastes2 que nous prélevons lors de la même biopsie. Le but est de pouvoir implanter un jour chez le patient le tube ainsi produit », explique le professeur François Berthod, spécialiste en génie tissulaire et chercheur de l’axe Médecine régénératrice au Centre de recherche du CHU de Québec-Université Laval.

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Un tube nerveux avant son implantation. 


Et ça marche?

Pour tester son idée, François Berthod travaille avec la neurochirurgienne Hélène Thida Khuong. Celle-ci a procédé à différentes greffes de nerf d’environ 15 millimètres de long et de 1 millimètre de diamètre chez le rat, en comparant les résultats obtenus avec un groupe contrôle « autogreffe » et un groupe « non réparé ». Jusqu’à maintenant, les résultats obtenus par la technique du Pr Berthod sont comparables à ceux d’une autogreffe. 

Des tests sont maintenant menés pour tenter de réparer des nerfs de plus grande longueur, soit environ 4 centimètres, chez le lapin. Les résultats seront connus au terme d’un suivi post-greffe d’environ un an, soit le temps nécessaire pour que qu’un nerf aussi gros repousse.

« Nous savons maintenant que le modèle fonctionne, mais il faut évaluer s’il est meilleur que les autres options que l’on a. Le défi est de fournir des nutriments aux neurones tout le long du circuit que l’on recrée », précise la Dre Khuong.

Selon le Pr Berthod, « si le fait d’utiliser des tissus vivants et d’y ajouter des capillaires donne des résultats concluants, ce sera une étape importante de franchie. Parce que l’objectif premier, c’est de fabriquer un greffon parfaitement adapté aux dimensions du nerf à réparer, ce qui devrait donner des résultats meilleurs que la combinaison de trois ou quatre petits nerfs lors d’une autogreffe. Et surtout, créer un greffon "personnalisé" éviterait de prélever un nerf sain au patient, ce qui serait 100 % positif : on va chercher le maximum de bénéfices sans créer de déficit supplémentaire. »
 

Et la suite?

Si les résultats chez le lapin sont concluants, l’équipe aimerait passer aux tests précliniques. Lorsque l’on reconstruit un nerf endommagé en prélevant le nerf sural, ce dernier n’est pas réparé. L’idée serait donc de tenter de faire repousser le nerf sural, puis de mener des tests de récupération tactile du pied. Sans faire courir de risque supplémentaire au patient autre que la chirurgie elle-même, il serait ainsi possible de valider si la technique fonctionne hors de tout doute. 

 


Les travaux de François Bethod figurent au palmarès des 10 plus grandes découvertes de l’année 2022 de Québec Science. Suivez ce lien pour lire l’article Savez-vous planter des nerfs?


Notes

  1. Cellules endotéliales : cellules tapissant la face interne des vaisseaux sanguins.

  2. Fibroblastes : cellules du tissu conjonctif, soit le tissu qui lie et soutien les organes.
     


Photo principale : l’équipe de recherche du Pr François Berthod. De gauche à droite : Pr François Berthod, Todd Galbraith, Alexane Thibodeau, Chantal Fauvel et Dre Hélène Thida Khuong.

 


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Dernière révision du contenu : le 8 mai 2023

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