De L’Hôtel-Dieu des Augustines au CHU de Québec-Université Laval en trois générations

Image.


Depuis trois générations, des membres de ma famille ont travaillé et travaillent encore dans ce qu’on appelle aujourd’hui le « CHU de Québec-Université Laval ».

Louis-Philippe, mon grand-père, était l’aîné d’une famille d’agriculteurs de Bellechasse comptant 13 enfants. Dès ses jeunes années, il se démarque par ses aptitudes intellectuelles et le curé du village offre à la famille de financer le cours classique de Louis-Philippe au Collège de La Pocatière dans le but d’en faire un prêtre.

Cependant, mon grand-père n’a pas la vocation et poursuit ses études en médecine à l’Université Laval. Le doyen de la faculté remarque l’étudiant et l’incite à se spécialiser. Après avoir obtenu son diplôme de médecine, Louis-Philippe part donc pour Paris, Bordeaux, Bologne et Vienne afin de poursuivre sa formation et se spécialiser en orthopédie.

De retour à Québec en 1933, il devient l’un des premiers chirurgiens orthopédistes de la ville.  

Louis_Philippe_Roy_25_mai_1933_Paris_Saint_Joseph_266x400.jpg
Louis-Philippe pendant ses études à Paris, à l'Hôpital Saint-Joseph, en 1933.


C’est à L’Hôtel-Dieu de Québec que la carrière de Louis-Philippe se déroulera, auprès de trois de ses sœurs entrées chez les Augustines: Gabrielle, photographe médicale, Rachel, infirmière, et Jeanne, Mère supérieure de la congrégation (la congrégation gèrera l’hôpital jusqu’en 1962). On dit que c’était un chirurgien particulièrement habile, notamment grâce au fait qu’il était ambidextre.

En août 1943, le premier ministre britannique Winston Churchill, le président américain Franklin Delano Roosevelt et le premier ministre canadien Mackenzie King sont réunis au Château Frontenac pour la Conférence de Québec. Une légende familiale raconte qu’un soir, alors que Churchill a un peu abusé des bonnes choses, il trébuche, tombe et se luxe une épaule. Il est tout de suite transporté à L’Hôtel-Dieu de Québec et c’est à mon grand-père que serait revenu l’honneur de lui replacer l’épaule... 

Le jeune Louis, mon père, accompagne parfois Louis-Philippe lors de ses tournées au Centre Cardinal-Villeneuve, dédié à la scolarisation et aux soins des enfants handicapés. L’une de ces visites s’avère déterminante pour Louis : un jeune garçon, dont les jambes étaient déformées par la polio, vient d’en retrouver l’usage grâce à une opération récemment exécutée par mon grand-père. Mon père n’en revient tout simplement pas et décide qu’il sera lui aussi chirurgien orthopédiste, mais pour enfants! 

Quelques années plus tard, mon grand-père supervisera Louis pendant sa résidence en chirurgie orthopédique à L’Hôtel-Dieu de Québec entre 1963 et 1968. C’est pendant cette période que mon père utilise ses quelques heures libres pour fonder le syndicat des résidents.

Louis-Philippe continuera à travailler à L’Hôtel-Dieu de Québec jusqu’à son décès, en 1974.

Après avoir terminé une surspécialité en orthopédie infantile à l’Hôpital pour enfants malades de Toronto (SickKids), mon père entame sa carrière au CHUL en 1969 en tant que premier chirurgien orthopédiste pour enfants de Québec. 

Louis_Roy_266x400.jpg
Louis à l'époque de ses études en médecine.


Dès 1971, il change d’établissement et poursuit sa carrière à l’Hôpital Saint-François d’Assise. C’est pendant cette période qu’il se spécialise dans le traitement des scolioses et s’intéresse à une nouvelle opération mise au point par un chirurgien orthopédiste français, le Dr Cotrel. Louis ira d’ailleurs passer un mois auprès de ce dernier en France pour apprendre sa technique et il sera ainsi le premier orthopédiste à la pratiquer en Amérique. Louis aime d’ailleurs les opérations longues et risquées, que ses collègues lui laissent avec plaisir! 

Cette belle carrière prend une autre direction au début des années 80 : pendant une opération, il est contaminé par un virus qui le contraint à cesser les longues et complexes chirurgies qui le passionnaient. Quelques années plus tard, il cesse complètement d’opérer; il se réoriente alors en toxicomanie et consacre beaucoup de temps à l’organisme humanitaire L’AMIE (Aide médicale internationale à l’enfance) au Québec et en République dominicaine.

La troisième génération

Environ 60 ans après notre grand-père et 30 ans après notre père, ma sœur Valérie obtient à son tour son diplôme de médecine de l’Université Laval en 1993. Elle fait ensuite sa résidence en pédiatrie entre 1993 et 1997 principalement au CHUL et à l’Hôpital Sainte-Justine. Elle est aujourd’hui pédiatre à l’Hôpital de Saint-Eustache, où elle a fondé le département de pédiatrie avec sa collègue et amie Nathalie Lemay, en 1998. Depuis juin 2022, sa fille Raphaëlle y est infirmière bachelière à l’Unité des naissances et en pédiatrie.

Valerie_Roy_graduation_1993_266x400.jpg
Valérie en 1993, lors de sa graduation en médecine.


Au printemps 2017, quelques membres de ma famille, dont mon père, mes sœurs et moi, sommes allés visiter le très beau et très intéressant musée du Monastère des Augustines. Après la visite, en sortant dans la cour du Monastère, je me rappelle m’être dit que les gens qui travaillaient dans cet environnement étaient bien chanceux… Je ne me doutais pas que quelques mois plus tard, j’aurais un bureau dans l’Aile des Remparts en tant que rédactrice en chef du Chuchoteur!

Et depuis, je me demande souvent si, par hasard, mon bureau ne serait pas l’ancienne chambre de l’une de mes grands-tantes Augustines...

Isabelle Roy
Rédactrice en chef

Le Chuchoteur


Laisser un commentaire



 Security code

 

Voir les commentaires
9 mai 2023

Merci Dr Montminy! Je vais transmettre votre gentil message à mon père. Au plaisir!

Par Isabelle Roy
8 mai 2023

J’ai eu l’honneur d’être invité à titre de résident par votre père lors de sa première chirurgie avec Dr Cotrel à SFA j’en garde un très bon souvenir et je l’en remercie encore.

Par Patrice Montminy
28 avril 2023

Bravo! Isabelle, un texte intéressant et bien écrit sur les générations de médecins de la famille Roy, une fierté pour tous ses membres et un rappel très pertinent pour son histoire et celle du CHU de Québec.

Par Marie Morency

Dernière révision du contenu : le 1 mai 2023

Signaler une erreur ou émettre un commentaire